Fabrice Bonmartin expose son travail intitulé l’Instinctif chez Tabadoul jusqu’au 17 février. Cet artiste Franco-Brésilien récemment installé à Tanger puise son inspiration dans l’inconscient et la vie tout simplement… Son sixième sens est au coeur de son oeuvre.
Comment faire pour que des « gribouillis » deviennent des oeuvres d’art ?
Il y a des artistes comme ça qui nous marque, sans que l’on sache pourquoi. Un jour par hasard, on m’a parlé de Fabrice Bonmartin, un peintre franco-brésilien installé à Tanger depuis quelques mois, après avoir exposé à Rio, New York ou Paris.
Je demande alors à voir ses peintures et là, stupéfaction totale. Une pluie de couleurs, un labyrinthe de formes, un tourbillon d’émotions, un cri de l’inconscient. Car Fabrice transforme les gribouillis que l’on dessine tous inconsciemment au coin d’une feuille en œuvre d’art.
Le rendez vous est pris à 14h00 à l’association Tabadoul à Tanger, Fabrice est là, décontracté, chaleureux, le sourire aux lèvres.
Fabrice est le genre de personne à laquelle on n’a pas forcément besoin de poser des questions, spontanément il commence à me parler, de lui, de sa peinture, j’ai à peine le temps d’allumer mon micro.
Le mot instinctif revient sans cesse dans la bouche de Fabrice, car sa peinture est instinctive, anthropologique, un appel de la vie irrépressible.
« On dessine depuis l’homme préhistorique, même en guerre ou en mourant de faim… c’est un besoin. L’écriture aussi est un dessin, les lettres sont des symboles et les phrases sont des images qu’on représente, quand on écrit… Dessiner c’est écrire et écrire c’est dessiner. L’Homme a besoin de laisser une trace, c’est ce qui nous différencie de l’animal. Les hommes préhistoriques, les Égyptiens, les Mayas toutes ces personnes ont laissé des traces de leur passage grâce au dessin. »
Je comprends alors mieux pourquoi Fabrice utilise autant le mot instinctif, car en voyant ses peintures, il y a quelque chose qui saute tout de suite aux yeux, une certaine franchise, un face à face avec quelque chose d’indescriptible, d’extatique et d’instinctif.
Je lui demande alors: « Quand j’ai vu vos peintures pour la première fois, j’ai pensé à Paul Klee ou encore à Augustin Lesage un peintre médium, est ce que l’on peut qualifier vos peintures de médiumniques, de cri de l’inconscient? »
« Je suis musulman et ma mère qui est brésilienne est spirite et au Brésil, on travaille beaucoup avec ce coté médiumnique, la médiumnité c’est naturel, on a tous un don, un sixième sens. Ce qui compte, c’est ce que l’on attire, ce que l’on ressent, quand je peins je m’ouvre à l’extérieur, ce n’est pas un esprit qui entre en mois, mais c’est plutôt moi qui entre dans l’esprit commun. Il ne faut pas réfléchir son dessin, mais capter une ambiance en mélangeant sa propre ambiance intérieure, et cela a beaucoup à voir, avec le ressenti, l’âme et donc le spirituel. »
Fabrice prouve que le dessin est vital.
« Un besoin de faire ressortir des formes en nous, car tout le monde a une vision et un besoin de l’exprimer c’est ça le dessin instinctif, la manière la plus naturelle de faire ressortir ce qui est en nous, c’est plus que de l’art mais un sérum de vérité une thérapie. »
« Un dernier mot pour la fin Fabrice ? »
« Je suis un rêveur, il y a beaucoup de choses à faire au Maroc, les gens sont ouverts! C’est une autre mentalité, ouverte pour des gens ouverts, ici les gens ont soif, du 17 janvier et jusqu’au 17 février j’expose à Tabadoul. Je veux faire le tour du Maroc, et revenir après en France pour exposer. Il faut dessiner, j’ouvre un espace où les gens peuvent créer et si vous avez du mal venez me voir à Tabadoul. »
Fabrice ou l’art de rendre visible l’invisible.
Amna Ferhati
Medi 1 Radio
09/01/2015 à 18:23
A propos de Fabrice Bonmartin
Né à Paris, d’origine Franco-brésilienne il est le fruit d’une culture très ancienne et d’une mentalité toute nouvelle. Mal à l’aise dans les lieux académiques, c’est grâce au dessin qu’il a réussi à poursuivre ses études jusqu’au bout. (BT dessinateur maquettiste et un BTS communication Visuelle à Paris puis une école pour être professeur de dessin et une initiation au web design en Ireland, à Dublin.)
« J’ai la ferme conviction que tout le monde est artiste car vivre est un art tel le graffiti, rares sont ceux qui le gratifient. L’homme dessine depuis qu’il a créé l’outil. C’est à cet instant qu’il s’est révélé différent de l’animal, en ressentant le besoin de laisser une trace permanente de son existence, à l’instar des dessins picturaux dans les grottes préhistoriques. L’Homme dessine en prison, en guerre où même en mourant de faim, il laisse un dernier message avant de partir. Il en est de même pour l’écriture, faite de symboles, ses phrases représentent des images. L’écriture est un dessin, elle est faite pour laisser une trace de notre passage et de notre pensée: Je pense donc je suis. Le dessin est donc vital car il apparaît dans la pyramide des besoins je pourrais presque dire comme manger, boire ou dormir. Il est une nécessité et c’est grâce à lui que nous avons beaucoup appris sur les civilisations anciennes car c’est le seul art permanent. »
Sa double culture est sa force et elle peut se retrouver dans son art. L’éclat et l’énergie, qui lui viennent du Brésil, le pays de sa mère, la rigueur et la recherche du détail de sa culture française.
« C’est aussi grâce à cette rigueur française et à cette ouverture d’esprit brésilienne que, autodidacte, je suis maintenant polyglotte, car pour moi le dessin est aussi une langue. C’est la langue universelle, et d’ailleurs si vous ne me comprenez pas je peux toujours vous faire un dessin… »
Au fil des années il a développé un art qui, aujourd’hui, peut être qualifié de « dessin instinctif ». Il est devenu, pour lui, la forme la plus naturelle de faire sortir les images qu’il possède au fond de lui-même.
« En se laissant aller à des gribouillages qui paraissent innocents nous découvrons nos images et nos couleurs que nous refermons au plus profond de nous-mêmes et que nous avons besoin d’exprimer.
Inconsciemment tout le monde au moins une fois dans sa vie a pris un stylo et a gribouillé pendant qu’il était au téléphone, en cours ou en réunion.
Ensuite dans ces formes, propres a chacun de nous, nous recréons instinctivement, nous voyons nos images inconscientes, de la même manière que lorsque nous regardons les taches de Rorschach en psychologie. Au final nous pouvons même nous analyser, car nous obtenons l’image que nous avons besoin de voir et non celle que nous voulions faire.
L’ambiance, l’état d’esprit et les personnes qui nous entourent se révèlent ainsi dans notre dessin sans que nous soyons capables de l’expliquer. Nous essayons de le comprendre, de la même manière que, lorsque l’on se réveille et que l’on se souvient de rêve, nous nous demandons pourquoi nous avons pensé à cela ».
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