Olivier Conil propose l’exposition du travail de Itaf Benjelloun à la Galerie Conil-Volubilis intitulée « Les maux bleus », bas relief, sculpture, installation… du 31 mars à fin avril 2018.
Elle nous dit…
Quand Les maux bleus se font un aveu de mélancolie, un chuchotement à fleur du monde, l’affleure, l’effleure autant d’un désir que d’une pensée… Itaf Benjelloun est du détroit, elle en connaît la palette comme elle sait tout ce qu’il est, de fureur, d’apathie, de violence et de séduction : elle nous dresse donc l’effigie de cette Belle au détroit dormant qu’elle connaît si bien, elle qui sait si bien l’esquive de l’autoportrait, qu’elle esquisse effumé et s’abîmant : une disparition comme une dissipation, l’une et l’autre reconnues dans le soupçon d’un baiser qui émerge des embruns et sous une pluie de médaillons, camées portés comme un pavoisement sur la poitrine de tous ceux pour qui bat un sentiment d’évanouissement. Elle nous dit les vagues à l’âme, nos tristesses profondes, nos amenuisements, nos grisailles et nos maussaderies, tout ce qui en nous ploie sous l’effet des contre-courants et des vents contraires… À l’épreuve du détroit, en sculptant le temps, façonnée d’opale et repolie de fragilité, elle nous dit Les maux bleus… Texte de Philippe Guiguet Bologne
Vernissage samedi 31 mars à 17h en présence de l’artiste
Galerie Conil – Volubilis
Place de la Kasbah
Tanger
A propos d’Itaf Benjelloun
Itaf Benjelloun est une artiste marocaine originaire de Ksar el Kébir. Sculpteure, designer et architecte d’intérieur, elle vit à Tanger. C’est là qu’elle a réalisé divers travaux d’aménagement d’intérieurs, de restauration et de décoration , ainsi que dans d’autres villes du Maroc. Elle a réalisé également plusieurs décors de cinéma et de théâtre.
Sa première exposition a eu lieu àTanger en 1997. Les sculptures de Itaf Benjelloun ne peuvent pas laisser indifférents. Elles étonnent d’abord. Elles sont si singulières et si familières à la fois. Singulières car elles sont faites de bric et de broc, de fer, de terre et de bois. Et familières car on reconnaît ce pied…de chaise, cette herse… griffue, cette spirale…. angoissée… Mais de la même façon que, sous sa plume de poète, Francis Ponge transfiguraient des objets quotidiens, Itaf Benjelloun subliment des fragments d’objets qui s’épousent, s’animent, dansent dans un mouvement cosmique. L’objet quotidien renferme en lui un monde que l’artiste perçoit et fait parler. Ainsi elle confiait dans un entretien cette jubilation ressentie très tôt face à l’objet en devenir et encore muet : « Aussi longtemps que je me souvienne, dans mes jeux d’enfant , il y avait toujours des fragments de matériau que je manipulais pour reconstituer un monde à l’échelle de mon imaginaire (…) Une boite cassée ou un objet… ces choses renfermaient des histoires.»
Sculpter, pour Itaf, c’est recréer : c’est faire se rencontrer des morceaux épars et d’autres fragments délaissés et de cette rencontre, faire naître une histoire ! C’est souvent une histoire de soudure, de fusion, de fêlure… Une histoire d’amour, peut être. C’est du moins ce que suggère l’exposition « Danse avec moi » d’octobre 2011 à la villa des Arts à Rabat. Etait mis en scène le ballet insolite de corps métalliques s’enroulant dans un tourbillon d’acier, aux visages ébréchés, aux regards égarés, perdus l’un dans l’autre, … des corps se soudant, fusionnant, s’agrippant l’un à l’autre au point de ne faire qu’un. Des visages morcelés figurant la passion qui embrase et brise. Des danseurs emportés dans un tango langoureux qui colle leurs mains, donne leur envol à leurs corps désarticulés.
Mais c’est une interprétation possible de ce ballet. D’autres lectures sont possibles. Les sculptures de Itaf sont une invitation au rêve, à l’envol, au voyage dans l’imaginaire. Une danse en trois temps : fer, terre, bois.
Samia Barrada