Un respect fraternel pour celles et ceux qui se sont mobilisés pour Jean Bihina, mort brutalement et bizarrement sur l’autoroute d’Assilah. Grâce à la collecte de ses amis et sympathisants, il pourra reposer en paix dans son Cameroun natal qu’il avait pourtant décidé de quitter! Stéphanie Gaou nous raconte la suite de son histoire…
Le corps de Jean Bihina quittera la morgue demain matin (mercredi 23 février 2022), grâce au fantastique élan de générosité de la part de contributrices & contributeurs, sans qui rien n’aurait été possible et qui ont été touché(e)s, ému(e)s, révolté(e)s par son histoire.
Je ne peux m’empêcher de dire que le cas de Jean est loin d’être exceptionnel et que ce qui lui est arrivé redevient de plus en plus fréquent au Maroc : arrestations abusives, contrôles d’identités au faciès, refoulements dans des zones hostiles (autoroutes de nuit, désert, etc.) Il faut savoir que les personnes interpelées sont, bien entendu, innocentes et souvent même en possession de leur passeport (ce qui n’empêche en rien leur refoulement loin des centres urbains).
Les dossiers de régularisation sont bloqués au Maroc depuis 2018, sans aucune explication claire avancée par les autorités. Malgré les alertes lancées par les associations, il semblerait que rien ne soit fait concrètement pour régulariser les personnes qui souhaitent s’installer finalement ici ; et c’est pourtant ce qui est attendu du Maroc.
Des « Jean », il y a en a partout dans les villes, ils ont un talent, un savoir-faire, une expérience de vie, ils cherchent un travail, un logement, à éduquer du mieux possible leurs enfants, une vie digne. Ne cherchez pas à savoir pourquoi ils sont partis de chez eux. S’ils l’ont fait, ils ont leurs raisons. Personne ne devrait nous obliger à rester là où nous sommes arbitrairement nés.
Une liste des contributrices/contributeurs sera remise par mes soins à la famille de Jean Bihina au Cameroun. Je ne pourrai pas me rendre sur place et je le regrette, mais toutes mes pensées sont avec eux, ainsi qu’avec sa compagne qui le pleure. Dans les jours prochains, je remercierai chacune et chacun en message privé.
Nous avons atteint la somme de 41.000 DHS. Les 38.000 DHS ont été versés aux pompes funèbres pour le rapatriement du corps. Les 3.000 DHS restants sont remis au cousin de Jean, Serge Guemou, qui s’est occupé de toutes les procédures administratives et juridiques.
D’autres personnes ont souhaité contribuer par la même occasion pour des actions concrètes de personnes en situation de migration (aide au logement, achat de médicaments, achats de meubles, etc). L’argent est déjà distribué à ceux qui sont dans le besoin. Un immense merci à toutes et tous.
Jean, qui nous manque déjà tant, rejoint sa terre natale mercredi. Lui qui disait toujours « On avance » a été stoppé dans son parcours.
Sa mémoire est là. Rien ne peut arrêter le souvenir. A toujours, Jean.
Stéphanie Gaou