Le samedi 31 juillet 2021 sa Majesté Mohammed VI a adressé un discours au peuple Marocain et au monde lors de la Fête du Trône (22e anniversaire de son règne). Un événement important qui fixe les grandes orientations politiques du Royaume. Un message de sagesse, de progrès, de rapprochement et de fraternité.
Texte intégral du Discours Royal :
« Louange à Dieu, Prière et salut sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons.
Cher peuple,
Vingt ans se sont écoulés depuis que M’est échue la charge de présider à ta destinée. La mission est à l’aune de la responsabilité qu’elle sous-tend, immense.
Devant toi et devant Dieu tout-puissant, J’ai fait le serment de l’accomplir avec un dévouement sincère.
Dieu est témoin de la persévérance avec laquelle J’ai défendu tes intérêts supérieurs et tes Causes justes.
Il est également témoin de la préoccupation absolue qui a toujours été la Mienne : te servir en veillant à ce que tous les Marocains, où qu’ils se trouvent, jouissent équitablement et librement de conditions de vie dignes.
Nous rendons grâce au Seigneur pour les bienfaits qu’Il nous a si généreusement prodigués, en cimentant, dans l’unité et la symbiose, le pacte d’allégeance mutuelle qui lie le Trône au peuple, en tissant entre toi et Moi des liens d’affection et de fidélité que le temps raffermit et fortifie.
Nous chantons Ses louanges pour l’unanimité nationale qui rassemble tous les Marocains autour des constantes et des symboles sacrés de la Nation, autour des choix majeurs du pays :
• Au premier rang : la Monarchie patriotique et citoyenne qui se veut proche des citoyens, en faisant siennes leurs préoccupations et leurs aspirations et en s’efforçant de les satisfaire.
• En deuxième lieu : la poursuite résolue de l’œuvre de consolidation démocratique et de quête du développement.
• Troisièmement : les réformes profondes engagées, les réconciliations menées à bonne fin et les projets d’envergure réalisés.
Grâce à la conjonction de ces choix essentiels, Dieu soit loué, Nous poursuivons l’édification du Maroc moderne, en nous employant à aplanir les difficultés rencontrées en chemin.
Nous remercions également le Très-Haut d’avoir couronné de succès les initiatives et les actions que Nous avons entreprises au service de Notre peuple et de Notre patrie.
Certes, il ne nous a pas toujours été donné de réaliser tout ce à quoi nous aspirons. Mais, aujourd’hui, Nous sommes plus déterminés à maintenir le cap, en capitalisant les acquis obtenus, en parachevant la dynamique de réformes en cours, en corrigeant les dysfonctionnements observés sur le terrain.
Cher peuple,
Nous avons accompli un bond qualitatif en matière d’infrastructures : autoroutes, train à grande vitesse, grands ports, énergies renouvelables, réhabilitations urbaines.
Nous avons également franchi des étapes importantes dans le renforcement et la consolidation des droits et des libertés, pour un ancrage solide et sain de la pratique démocratique.
Néanmoins, Nous savons que les infrastructures et les réformes institutionnelles, si importantes soient-elles, ne sont pas suffisantes.
Le devoir de clarté et d’objectivité impose de nuancer ce bilan positif dans la mesure où les progrès et les réalisations, d’ores et déjà accomplis, n’ont malheureusement pas encore eu des répercussions suffisantes sur l’ensemble de la société marocaine.
Certains citoyens perçoivent sans doute mal les retombées de ces réalisations sur leurs conditions de vie, notamment en termes de satisfaction de leurs besoins quotidiens et singulièrement en ce qui concerne la fourniture de services sociaux de base, la réduction des inégalités sociales, le renforcement de la classe moyenne.
Dieu sait à quel point Je suis peiné de voir que des citoyens marocains, ne représenteraient-ils que 1% de la population, continuent à vivre dans la précarité et le dénuement matériel.
C’est pourquoi Nous avons attaché une importance particulière aux programmes de développement humain, à la promotion des politiques sociales pour parvenir in fine à la satisfaction des attentes pressantes des Marocains.
Comme Je l’ai souligné dans le Discours de l’année dernière, Je n’aurai de répit que lorsque tous les obstacles auront été éliminés, que des solutions appropriées auront été apportées aux problèmes de développement et aux questions sociales.
Cet objectif suppose une vision globale et des projets menées à bonne fin grâce à des ressources qualifiées et des conditions favorables.
Cher peuple,
Les dernières années ont révélé l’incapacité de notre modèle de développement à satisfaire les besoins croissants d’une partie de nos citoyens, à réduire les inégalités sociales et les disparités spatiales. C’est la raison pour laquelle Nous avons appelé à sa réévaluation et à sa réactualisation.
En fait, J’émets des réserves sur la pertinence de la création de commissions spéciales, car certains trouvent dans ce procédé le meilleur moyen d’enterrer des dossiers et de passer sous silence les problèmes qui s’y rattachent.
Néanmoins, Nous avons pris l’initiative d’en créer certaines auxquelles Nous avons confié la mission d’examiner des questions d’intérêt national comme la Régionalisation et la Constitution, le Code de la famille, les affaires liées à l’Instance Equité et Réconciliation. Notre suivi personnel de leurs travaux a permis d’atteindre des résultats concluants et positifs.
A cet égard, Nous avons décidé de mettre en place la commission spéciale chargée du modèle de développement. Nous procéderons à son installation à la rentrée prochaine.
Nous avons veillé à ce que cette commission, par sa composition, regroupe différentes disciplines académiques et diverses sensibilités intellectuelles, en y faisant siéger des compétences nationales issues du public et du privé. Outre de l’expérience et une exigence d’impartialité, ces profils doivent être suffisamment outillés pour comprendre les dynamiques à l’œuvre au sein de la société et aller au-devant de ses attentes, sans jamais perdre de vue l’intérêt supérieur de la Nation.
A ce propos, Je tiens à souligner que cette commission ne tiendra lieu ni de second gouvernement, ni d’institution officielle parallèle. Elle jouera le rôle d’organe consultatif investi d’une mission limitée dans le temps.
Au cours de ses travaux, elle devra prendre en considération les grandes orientations des réformes engagées ou en passe de l’être, dans des secteurs comme l’enseignement, la santé, l’agriculture, l’investissement, le système fiscal. Ses propositions devront viser leur perfectionnement et l’accroissement de leur efficacité.
Nous attendons de cette commission qu’elle remplisse son mandat avec impartialité et objectivité en portant à Notre connaissance un constat exact de l’état des lieux, aussi douloureux et pénible puisse-t-il être. Elle devra aussi être dotée de l’audace et du génie nécessaires pour proposer des solutions adaptées.
Plutôt que de s’inscrire dans une logique de rupture avec le passé, il s’agit de poser un nouveau jalon dans notre processus de développement.
Il importe avant toute chose de faire preuve d’audace, d’esprit d’initiative, d’un sens élevé des responsabilités, lors de la mise en œuvre des conclusions judicieuses et des recommandations pertinentes qui seront adoptées, seraient-elles difficiles ou coûteuses.
Je reviendrai sur le sujet dans un futur proche.
En parallèle, le travail doit se poursuivre avec un sens accru de l’engagement et des responsabilités, pour assurer une meilleure gestion des affaires publiques et pour répondre efficacement aux préoccupations des citoyens.
L’accent doit notamment être mis sur l’amélioration des prestations sociales de base et le rehaussement de la performance des services publics.
En outre, Nous invitons le gouvernement à commencer la préparation d’une nouvelle génération de grands plans sectoriels, cohérents et harmonieux, susceptibles de servir de pilier au modèle de développement dans sa nouvelle version.
Cher peuple,
La rénovation du modèle de développement national n’est pas une fin en soi ; elle est le préalable à l’émergence d’une étape nouvelle dans laquelle Nous souhaitons, avec l’aide de Dieu, engager le Maroc.
Une étape nouvelle dont les maîtres mots sont « Responsabilité » et “Essor”.
Cette étape nouvelle est d’autant plus prometteuse que le Maroc recèle bien des énergies et des potentialités qui lui permettent de créer des conditions favorables d’impulsion et de développement. Nous disposons assurément d’atouts indispensables.
Notre ultime souhait est que le Maroc accède au club des nations avancées.
Par ailleurs, la nouvelle étape que nous nous préparons à franchir abonde en en enjeux et en défis, internes et externes, qu’il convient de remporter :
• Premièrement : l’enjeu de consolidation de la confiance et des acquis : confiance entre les citoyens, confiance dans les institutions nationales qui les rassemblent, confiance et foi dans un avenir meilleur. C’est la clé de la réussite et la condition sine qua non pour que se concrétise notre ambition collective.
• Deuxièmement : le défi de l’ouverture et le refus du repli sur soi, particulièrement dans des domaines liés aux expériences et aux expertises internationales. L’ouverture est d’autant plus fondamentale pour le développement économique qu’elle offre aux entreprises et aux opérateurs marocains nombre d’opportunités de rehausser leur compétitivité.
Elle est porteuse d’un véritable potentiel pour drainer des investissements, des connaissances et du savoir-faire de l’étranger. Elle constitue un levier pour améliorer la qualité des services et le rendement des organisations, pour rehausser le niveau des formations dispensées, et pour créer in fine plus d’emplois.
Certes, l’État, le secteur public, les organisations professionnelles nationales ont déployé de grands efforts pour remplir leurs missions et améliorer la qualité de leur travail.
Mais, certaines filières et professions libérales ont besoin aujourd’hui de s’ouvrir aux expertises et compétences mondiales, au secteur privé, national et étranger.
Par ailleurs, de nombreuses institutions et sociétés internationales ont exprimé le souhait d’investir et de s’installer au Maroc.
Véritable motif de satisfaction, cet engouement pour notre pays témoigne de la confiance qui lui est reconnue. Mais les freins imposés par certaines législations nationales, la frilosité et l’indécision prépondérantes chez certains responsables cantonnent parfois le Maroc et le placent dans une posture négative d’enfermement et de réserve.
Ceux qui s’opposent à l’ouverture de certains secteurs -sans vouloir dire lesquels- sous prétexte que cela induirait des pertes d’emplois, ne se soucient guère des Marocains et cherchent avant tout à préserver leurs propres intérêts.
A l’inverse de cette logique, l’investissement étranger dans ces secteurs est susceptible de consolider les efforts de l’État en termes de création de nouveaux emplois ; il peut favoriser une formation de qualité et attirer les savoir-faire, les expériences réussies.
• Troisièmement : le défi de l’accélération économique et de l’efficacité institutionnelle. L’enjeu est ainsi de rebâtir une économie forte et compétitive, en encourageant l’initiative privée, en lançant de nouveaux programmes d’investissement productif et en créant de nouvelles opportunités d’emploi.
Dans la même perspective, il convient de renforcer l’efficacité des institutions et de faire évoluer les mentalités des responsables.
En effet, le secteur public doit, sans tarder, opérer un triple sursaut en termes de simplification, d’efficacité et de moralisation.
D’ailleurs, J’ai d’ores et déjà appelé à la nécessité de moderniser les méthodes de travail, de faire preuve d’ardeur créative et d’innovation dans la gestion de la chose publique.
• Quatrièmement : le défi de la justice sociale et spatiale pour parachever l’édification d’un Maroc, porteur d’espoir et d’égalité pour tous.
Un Maroc où s’estompent les disparités criantes et les comportements générateurs de frustration, où disparaissent les formes de rente existantes et les situations induisant des déperditions de temps et d’énergie.
Il faut, donc, en finir avec les agissements et les aspects négatifs, en faisant triompher les valeurs de travail, d’engagement responsable, de mérite, d’égalité des chances.
Cher peuple,
La réussite de cette nouvelle étape passe par l’implication des institutions et des instances nationales concernées, par un ferme engagement qui donnera un élan nouveau à la dynamique de développement socio-économique dans notre pays.
Elle exige également que tous se mobilisent afin que le principe selon lequel “les intérêts de la Nation et des citoyens doivent passer avant tout”, ne soit plus une formule mais qu’il retrouve toute sa substance.
Outre le rôle primordial des différentes institutions nationales, J’insiste sur la nécessaire implication du citoyen marocain en tant qu’acteur principal dans l’aboutissement de cette nouvelle étape.
Aussi, J’invite tous les Marocains à apporter leur pierre à l’édifice, mus par un esprit de citoyenneté agissante car les résultats auxquels Nous aspirons, les projets et les initiatives que Nous entreprenons, visent un seul objectif : améliorer les conditions de vie de tous les citoyens.
Par la volonté de Dieu, cette nouvelle étape sera marquée par le lancement d’une nouvelle génération de projets. Elle nécessite par conséquent de nouvelles compétences aux différents postes et niveaux de responsabilité. Du sang neuf doit, donc, être apporté au sein des institutions et des instances politiques, économiques et administratives, y compris le gouvernement.
A cette fin, à l’horizon de la rentrée prochaine, Nous chargeons le chef du gouvernement de soumettre à Notre Appréciation, des propositions visant à renouveler et enrichir les postes de responsabilité, tant au sein du gouvernement que dans l’Administration, en les pourvoyant de profils de haut niveau, choisis selon les critères de compétence et de mérite.
Cela ne signifie évidemment pas que le gouvernement et les structures publiques ne comptent pas de compétences en leur sein.
Mais, Nous souhaitons mettre à contribution des profils dotés d’une nouvelle mentalité, à même de hisser l’action à des niveaux supérieurs, pour réunir les conditions de réussite de cette nouvelle étape, pour accomplir in fine la mutation profonde que Nous appelons de nos vœux.
Cher peuple,
La célébration de la Glorieuse Fête du Trône est l’expression la plus éloquente de notre attachement indéfectible à la marocanité de notre Sahara, à notre unité nationale et à notre intégrité territoriale. Elle est aussi l’affirmation solennelle de notre souveraineté pleine et entière sur l’ensemble du territoire du Royaume.
Les acquis engrangés par notre pays aux plans onusien, africain et européen sont pour Nous un motif de fierté. Toutefois, Nous appelons à une mobilisation constante à tous les niveaux, pour que soient consolidés ces acquis et contrecarrées les manœuvres des ennemis.
Le Maroc maintient son adhésion sincère au processus politique mené sous l’égide exclusive des Nations Unies.
Sa position de principe est claire : la souveraineté pleine et entière du Maroc dans le cadre de l’initiative d’autonomie est la seule et unique voie envisageable pour parvenir au règlement souhaité.
Par ailleurs, aucun pays ne peut à lui seul relever les défis sécuritaires et de développement auxquels nous sommes confrontés.
Aussi, nous réaffirmons notre engagement sincère à garder la main tendue en direction de nos frères en Algérie, fidèles en cela aux liens de fraternité, de religion, de langue et de bon voisinage, qui unissent depuis toujours nos deux peuples frères.
La dernière illustration en date de cette proximité remonte à la Coupe d’Afrique des Nations, organisée récemment dans le pays frère d’Égypte, au cours de laquelle le Roi et le peuple du Maroc, dans un élan spontané et sincère, ont témoigné leur sympathie et leur soutien enthousiastes à la sélection algérienne. Ils se sont joints au peuple algérien pour partager sa fierté, à la suite du sacre mérité lors de cette compétition, car, cette victoire, ils l’ont ressentie comme étant aussi la leur.
Cette foi profonde dans la communauté de destin, sous-tendue par une histoire et une civilisation communes, nous incite à œuvrer, avec espoir et optimisme, à la réalisation des aspirations à l’unité, à la complémentarité et à l’intégration, portée par nos peuples maghrébins frères.
Cher peuple,
Le Maroc appartient à tous les Marocains car il est notre maison commune. Voilà pourquoi chacun de nous se doit, à son niveau, de contribuer à son édification, à son essor, à la préservation de son unité, de sa sécurité et de sa stabilité.
Un Maroc qui accueille tous ses enfants, qui leur accorde, sans exception ou discrimination, la jouissance des mêmes droits et libertés et qui les soumet, dans le respect de la dignité humaine, aux mêmes devoirs.
Nous sommes saisi en ce moment d’une pensée émue et déférente pour la mémoire de tous les Marocains épris de liberté, qui ont consenti d’énormes sacrifices pour la liberté et l’indépendance, et ont concouru à l’édification d’un Maroc moderne, où règnent en maîtres-mots : “développement”, “démocratie” et “progrès”.
Nous songeons plus particulièrement à Notre Auguste Grand-Père, feu Sa Majesté le Roi Mohammed V et Notre Illustre Père, feu Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu les ait en Sa sainte miséricorde.
Nous saisissons cette opportunité pour rendre un vibrant hommage aux Forces Armées Royales, à la Gendarmerie Royale, aux Forces Auxiliaires, à la Sûreté nationale et à la Protection civile, toutes composantes confondues, pour leur mobilisation constante, sous Notre commandement, afin de défendre l’unité nationale et de préserver la sécurité et la stabilité du pays.
« Allah a promis à ceux d’entre vous qui croient et font de bonnes œuvres, qu’Il leur donnerait la succession sur terre comme Il l’a donnée à ceux qui les ont précédés ». Véridique est la parole de Dieu.
Wassalamou alaikoum warahmatoullahi wabarakatouh ».